Augmentation saisonnière des graminées digitaires & co.

Au nord des Alpes, le terme "digitaires" désigne les espèces du genre Digitaria. Il n'est pas rare qu'à cette époque de l'année, dans la deuxième moitié de l’été, ces graminées semblent avoir le vent en poupe aux yeux de nombreuses personnes, et aussitôt se pose la question de savoir s'il pourrait s'agir de néophytes envahissantes qui prolifèrent partout.

L'espèce de loin la plus fréquente est la digitaire sanguine, Digitaria sanguinalis. La distinction avec les autres digitaires nécessite des connaissances précises et n'est pas toujours facile, même pour les spécialistes. Il s’agit d’une graminée indigène et n'est donc pas une néophyte envahissante !

Digitaria sanguinalis, aggr. © Peter Bollinger

Le phénomène d’augmentation soudaine des digitaires est connue. Il convient toutefois de distinguer deux "types d’augmentation" différentes :

(1)     Augmentation saisonnière : les espèces de Digitaria sont thermophiles et ont besoin d'une certaine chaleur quotidienne et d'une certaine somme de chaleur pour leur cycle de vie. Elles n'arrivent donc à fleurir qu'à la fin de l'été et semblent alors soudainement connaître une croissance explosive. Au début de l'été suivant, elles ont soudainement "disparu", pour ensuite réapparaître à nouveau à la fin de l’été.

(2)     Augmentation due au réchauffement climatique : tant le réchauffement climatique général que le réchauffement dû aux activités croissantes de construction et d'imperméabilisation des sols (le béton servant d'accumulateur de chaleur) favorisent ce type d'espèces herbacées qui ont besoin de chaleur.

Les deux "types d'augmentation" se superposent, l'augmentation saisonnière étant beaucoup plus évidente et donnant l'impression d'une "augmentation significative".

Ces dernières années, la digitaire ciliée (Digitaria ciliaris), une proche parente de la digitaire sanguine, a gagné du terrain, surtout dans les champs de maïs. La diffusion et le potentiel de causer des dommages de cette espèce doivent être surveillés.

Il existe d'ailleurs en Suisse quelques autres espèces de graminées à épis divergeant à l'apex de la tige comme les doigts d'une main, mais elles sont plutôt présentes dans d'autres milieux. Nous les présentons brièvement ici :

• Le pied de poule (Bothriochloa ischaemum) : une espèce thermophile indigène des pelouses sèches, potentiellement menacée (catégorie NT de la Liste rouge suisse).  
• Le chiendent pied de poule (Cynodon dactylon) : une herbe néophyte vivace que l'on trouve surtout le long des chemins, entre les pavés, dans les décombres, dans les régions chaudes (n'est pas considérée comme une néophyte envahissante).
• L'éleusine des Indes (Eleusine indica) : une herbe annuelle néophyte présente surtout dans les lieux incultes, les décombres, les champs et principalement au Sud des Alpes (n'est pas considérée comme une néophyte envahissante).

Cynodon dactylon © Christophe Bornand

Bothriochloa ischaemum © Philippe Juillerat

Texte: Brigitte Marazzi & Stefan Eggenberg